Madame la Première Ministre, n’oubliez pas les Travailleur.euses du

Sexe !

Madame la Première Ministre,

Nous sommes des oublié.es de la crise. On ne parle jamais de nous dans les discours officiels, mais pourtant nous existons.

UTSOPI (l’Union des Travailleur.euses du Sexe Organisé.e.s pour l’Indépendance) est une association belge défendant les intérêts des travailleur.euses du sexe, composée exclusivement de TDS et d’ex-TDS. Aujourd’hui, UTSOPI vous écrit afin de vous alerter à propos de la situation des TDS dans notre pays. En effet, malgré le déconfinement annoncé ce 6 mai par le Conseil national de sécurité, nous ne disposons à ce jour d’aucune information quant au sort des travailleur.euses du sexe et une éventuelle reprise de leur activité.

Ce manque complet d’information, par ailleurs souvent interprété comme un manque de considération à l’égard de notre communauté, engendre de multiples conséquences, un peu plus graves chaque jour. Au quotidien, grâce à des dons essentiellement de personnes privées et d’associations humanitaires, UTSOPI vient en aide aux travailleur.euses du sexe qui se retrouvent totalement privé.es de revenus, sans plus aucune ressource pour parfois juste s’alimenter et survivre. Il ne s’agit pas là de cas isolés, mais bien de la majorité des TDS qui sombrent dans la précarité la plus extrême. Des mères isolées avec enfants ne sachant plus faire leurs courses, des personnes transgenres doublement si pas triplement stigmatisées, sans solution d’hébergement, des femmes migrantes dans des situations d’exploitation et de coercition sans aucune perspective d’avenir, des hommes et des femmes ne sachant plus finir le mois et payer leurs charges, voilà le quotidien de l’ensemble des TDS depuis le début de cette crise.

Pour autant, nous nous adaptons. Nous avons mis en place dans l’urgence des initiatives communautaires et solidaires, précaires elles aussi, mais qui permettent de survivre. Ce qui nous tue, c’est le temps qui passe, et l’absence de réponses à nos légitimes interrogations. Combien de temps devrons-nous compter sur les distributions alimentaires ? Que dois-je dire à mon propriétaire ? Quand pourrais-je de nouveau gagner de l’argent ? Comment dois-je faire pour payer le loyer de ma « vitrine »? Que répondre à mes clients ? Et pour moi, le déconfinement, ce sera quand : le 18 mai, le 3 juin, l’été 2023 ?

Ces questions, nous les entendons tous les jours de la part des TDS qui s’adressent à nous, et les seules réponses que nous pouvons leur apporter consistent à regarder dans une boule de cristal ou à jouer aux apprentis sorciers.

Nous ne vous demandons pas de faire des miracles. Nous avons bien conscience que ni vous, ni votre gouvernement, ni personne, n’a le don d’omniscience et ne peut prédire ce qu’il va se passer demain. Ce que nous vous demandons, c’est de prendre en considération les TDS, et de nous apporter un minimum de réponses quant à une date prévisionnelle de déconfinement de notre activité, quitte à la décaler ensuite. C’est le respect et la considération que mérite chaque citoyen.ne.

Rappelons par ailleurs, que le travail du sexe concerne en Belgique environ 26.000 personnes, et génère 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires par an. Si c’est une politique économiste qui est en jeu, alors le travail du sexe mérite d’être considéré.

Sans quoi Mme Wilmès, si vous et votre gouvernement ne vous mobilisez pas pour apporter une réponse aux plus précaires, alors nous allons au-devant d’une catastrophe économique et sanitaire, où les TDS en Belgique vont mourir, non pas du COVID-19, mais de faim, de froid et de suicide.

Remettre la question entre les mains des autorités communales ou des entités fédérées ne ferait qu’entretenir le flou : certaines d’entre elles autoriseront les TDS à reprendre leur activité, d’autres refuseront. Désespéré.es, de plus en plus de TDS prendront des risques pour leur santé, leur entourage, ou encore celui d’être verbalisé pour l’exercice d’une activité qui, aux yeux de la Belgique, hormis pour le prélèvement d’impôts et de taxes, n’existe même pas réellement.

Madame la Première ministre, aidez-nous. Comme tous les autres travailleur.euses, les TDS méritent d’être écouté.es par nos autorités, qui ne peuvent abandonner personne au bord de la route.

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